Des films comme Swoon (Kalin), Poison (Haynes), Edward II (Jarman), Looking for Langston (Julien) marquent ce que l’on appelle le New Queer Cinema : un cinéma gay décomplexé produit dans les marges (de l’industrie) et parlant des marges (de la société). Ces réalisateurs lorgnent du côté de l’expérimentation formelle et de la transgression des normes esthétiques. Ils exposent une identité sexuelle en rupture avec le conformisme des mouvements assimilationnistes. Parce que ces films sont marqués par le sida et les politiques néo-conservatrices américaine et anglaise, la violence et le nihilisme en sont les expressions privilégiées.












DIMANCHE 3 MAI • 18h10
au cinéma UTOPIA

Derek
Isaac Julien
GB, 2008, 1h16, vostf

Évocation intime et poétique de la vie et de l’oeuvre du cinéaste Derek Jarman (1942-1994), Derek esquisse le portrait d’un artiste-activiste polymorphe, peintre, écrivain, jardinier… et figure majeure du cinéma anglais d’avant-garde de la fin du XXe siècle. La trame narrative repose ici sur deux éléments : une lettre adressée à Jarman par Tilda Swinton, égérie et amie du cinéaste et un entretien fleuve qu’il a livré en 1991 à Colin McCabe, son producteur. À cela, s’ajoute un concert d'autres voix stridentes, tramées, flashantes, tremblantes : films de famille, extraits d'actualités, extraits de ses films réalisés entre 1976 et 1994…
On redécouvre ainsi son premier long, Sebastiane qui montre pour la première fois, ditil, « deux hommes (qui) le font réellement à l'écran » ; ses adaptations cinématographiques du théâtre élisabéthain (The Tempest, Edward II) ; ses clips vidéos (The Pet Shop Boys, The Smiths) et son film expérimental intime/ultime (Blue, 1994). Se dévoilent alors la rigueur, la poésie et la véhémence avec lesquelles Jarman a questionné l’art et la société.
« Le cinéma de Derek Jarman est aussi politique, manifestant son opposition à toute autorité comme à tout système et bientôt arc-bouté contre la Dame de Fer, comme contre les constructions normatives et exclusives. Gay déclaré, puis séropositif déclaré, Jarman est de toutes les manifestations de rue, notamment avec OUTrage, l'équivalent britannique d'Act up au début des 90's » (Elisabeth Lebovici).

Isaac Julien livre ici un hommage vivant, « en prenant le fil de son sujet comme une partition incomplète pour en décrire ”l'en cours”, les potentialités » avec une inventivité formelle, à l’image de celle qui a fait de Derek Jarman un cinéaste incontournable.

Comme Derek Jarman avec le film Edward II (1991), l’artiste anglais Isaac Julien a fait partie dans les années 90 de la vague du New Queer Cinema avec Looking for Langston et Young Soul Rebels.